De l’amour et pas un téléphone!

De l’amour et pas un téléphone!

Au Petit Duc la « contre-diva du jazz », Cathy Heiting, présentait un nouveau répertoire de créations : Unconditional

EP à la clé, spectateurs en salle et sur écrans (la chaîne du Petit Duc permet une multiplication exponentielle du public), la soirée programmée par l’irrésistible duo Myriam Daups et Gérard Dahan affichait complet. Il est vrai que l’annonce de la venue de Cathy Heiting, une fidèle du lieu, est toujours attendue, tant cette artiste inclassable a su séduire par sa verve et la qualité irréprochable de son travail. Avec sa voix qui arpente sans effort apparent les trois octaves, la chanteuse se meut avec autant d’aisance dans le jazz, le funk, le lyrique (on a toujours un souvenir ému de Bizet était une femme où virtuosité vocale et instrumentale subjuguaient jusqu’aux zygomatiques mis à rude épreuve !), et explore tous les genres, accorde sa lecture de standards de la pop (sa reprise de « 1/2/3drink »  (Chandelier de Sia) a fait date), écrit, crée, sait réunir autour d’elle la fine fleur des musiciens et créer avec et entre eux une complicité sensible. 

Pour l’occasion elle réunit Sylvain Terminiello (double bass), Samuel Bobin (batterie), Renaud Matchoulian (guitare électrique), Ugo Lemarchand (piano et saxophone ténor). Chacun apporte sa contribution aux arrangements, aux compositions rêvées à deux ou trois. L’écoute de l’autre, la liberté laissée à l’improvisation, la sûreté des ensembles qui jouent sur les textures, les harmonies, les contre-chants, les variations, offrent une palette pailletée profondément ancrée dans l’inspiration jazzique. Les solos ne cherchent pas à éblouir par leur virtuosité technique, elle semble si naturelle, mais travaillent les couleurs, abordent l’intime avec une sobre élégance.

Cathy Heiting et Sylvain Terminiello au Petit Duc © Mitch Bis

Cathy Heiting et Sylvain Terminiello au Petit Duc © Mitch Bis

Le thème de la nouvelle création tient de la gageure tant l’époque est troublée : articuler tout un répertoire sur le thème de l’amour peut aussi prendre des allures révolutionnaires alors que le monde se déchire !

Cet amour est inconditionnel, réunit certes les amoureux, mais aussi les familles, les êtres, le monde. « Nous allons évoquer l’amour sous toutes ses formes, explique en introduction l’espiègle musicienne, carré, rond, rectangulaire… ». On commence par des roses, celles qui évoquent les personnes empathiques, The rose, puis on remonte une histoire d’amour depuis sa fin jusqu’à ses débuts en trois chansons, un texte est dédié à France, la sœur disparue l’an dernier de la chanteuse, deux morceaux sont consacrés à ses deux fils, un passage « quizz » reprend My Funny Valentine ce qui donne l’occasion d’un magnifique duo contrebasse, voix…

Cathy Heiting au Petit Duc © Mitch Bis

Cathy Heiting au Petit Duc © Mitch Bis

On passe par tous les registres avec fluidité. On se laisse porter par les mélodies, happer par les rythmes, surprendre par les enchaînements. Le morceau de rappel est le seul en français, sur un poème de Samuel Bobin, sublime…

Cathy Heiting choisit ici un retour à l’épure, à un jazz lumineux qui nous touche. Et c’est très beau.

26 janvier, Petit Duc, Aix-en-Provence

Cathy Heiting Quintet au Petit Duc © Mitch Bis

Cathy Heiting Quintet au Petit Duc © Mitch Bis

Soleils sous la pluie

Soleils sous la pluie

Reprendre sur scène la mythique comédie musicale Chantons sous la pluie, immortalisée par le film de Stanley Donen avec les non moins mythiques Gene Kelly et Debbie Reynolds tient de la gageure ! C’est cependant le défi que Patrick Leterme et sa compagnie belge, Ars lyrica relève avec panache. 

Pour les fêtes de fin d’année, le Grand Théâtre de Provence offrait son large plateau aux déferlements hollywoodiens de cette œuvre pétillante qui rend compte avec humour du passage du muet au cinéma parlant. Certes, il ne fallait pas rechercher un « copié-collé » parfait du film ; le théâtre n’est pas fait pour cela.

Mais la vivacité des comédiens-chanteurs-danseurs, l’ingéniosité de la scénographie qui permet de passer aisément d’un tableau à un autre, usant parfois d’une malicieuse mise en abîme, surent pallier à l’impossibilité par exemple de la mise en scène du morceau de bravoure de « Make them laugh » interprété par le regretté Donald O’Connor ou la vision des studios de cinéma où sont filmés des scènes de western, ou encore les numéros de claquettes sur le bureau et les chaises du professeur de diction (auquel se substitue une sémillante professeure dans la version théâtrale) et tant d’autres scènes, sans compter la plus grande partie de Broadway Melody avec l’incomparable et vénéneuse (dans le film)  Cyd Charisse).

Chantons sous la pluie @ Pierre Bolle

Chantons sous la pluie @ Pierre Bolle

L’esprit de l’ensemble est préservé avec intelligence et dynamisme. On se laisse emporter par les dialogues savoureux en français pour l’occasion, les chants, heureusement en anglais, dont on retrouve les inflexions, soutenues par le Candide Orchestra dirigé depuis son piano par Patrick Leterme. Cette comédie musicale créée en juin 2021 à l’Opéra de Massy met ainsi en avant une phalange de jeunes talents qui durant deux heures quarante enchaînent avec brio les étapes scandées par des vidéos projetées sur écran et les rapides changements de décor.

On rit encore de la voix si caractéristique de la « dame qui zozote », Lina Lamont (superbe Marie Glorieux) qui a bien du mal à synchroniser sa voix au micro, on est séduit par la verve de Cosmo (Mickey de Marco), l’ami de Don Lockwood (Edouard Thiebaut qui a la lourde charge de la reprise du rôle tenu originellement par Gene Kelly) très à l’aise dans le tube Singing in the rain célébrant son amour tout neuf pour la délicieuse Kathy Selden (Marina Pangos, toute d’espièglerie et d’allant).

Chantons sous la pluie @ Gaël Bros

Chantons sous la pluie @ Gaël Bros

Les chorégraphies (Johan Nus et Sylvie Planche), les costumes (Gaël Bros Vandyck), les éclairages (Arnaud Delmotte), tout contribue à une soirée de paillettes. La reprise de Singing in the rain aux rappels sera dansée en imperméables dorés… Un vrai cadeau de Noël !

Spectacle vu le 21 décembre au GTP, Aix-en-Provence

Chantons sous la pluie @ Pierre Bolle

Chantons sous la pluie @ Pierre Bolle

Leçon d’intuition pianistique

Leçon d’intuition pianistique

L’association Charlie Free sait concocter des évènements précieux tout au long de l’année. Particulièrement attendue et hébergée dans la salle du théâtre de Fontblanche, la venue de l’inclassable et génial Craig Taborn a rempli ses promesses

Le pianiste, lauréat du Paul Acket Award 2012 (North Sea Jazz Festival à Rotterdam), coup de cœur Jazz et Blues 2017 de l’Académie Charles Cros, délaisse parfois ses complices, tels James Carter, Roscoe Mitchell, Chris Potter ou Charles Loyd, pour jouer en solo.  Son CD Shadow Plays enregistré en 2020 en public à la Konzerthaus de Vienne (chez ECM) rappelle sa performance soliste.

C’est cette dernière que le public de Fontblanche, la salle du Moulin à Jazz s’avérant trop exigüe, a eu le privilège d’écouter le pianiste dont les improvisations sont devenues un mode de jeu fascinant. Les sonorités qui semblent jouer des battements des cordes, frémissent de subtils écarts, endossent des fragrances métalliques, dressent des falaises sonores où les notes se précipitent en cascades, puis s’attardent sur un motif ostinato dont les orbes deviennent vecteur de rêve. La matière sonore est travaillée comme un tableau, avec ses détails, ses paillettes, ses larges paysages, ses aplats, ses empâtements, ses contrastes, ses glacis qui laissent vibrer les transparences, ses perspectives amples, ses vedutas fantasmagoriques, respirations où l’imaginaire se love.

Craig Taborn @ D.R.

Craig Taborn @ D.R.

Au cœur de cette hypnose sonore se glissent les références à toute une histoire de la musique, on songe aux influences de Steve Reich bien sûr, mais aussi de Boulez, Ligeti, Keith Jarrett, lorsqu’un air de ragtime ne vient pas rappeler les origines du jazz. Abstraction lumineuse et dynamique envoûtante se conjuguent en un scintillant parcours qui passe du tellurique à l’aérien, frôle les ombres et les fait se muer en velours délicats avant une affirmation d’espoir, Now in Hope, et un bis dédié au chanteur et musicien Terry Allen. Une bulle poétique.

Concert donné le 1er décembre au théâtre de Fontblanche, Vitrolles

Voyage in Leleuland

Voyage in Leleuland

« Born to groove » en création mondiale au GTP, une histoire forte d’enfances et de passions musicales sans frontières

Après des retrouvailles rocambolesques avec son tuba qui a mis trente heures pour effectuer le transit de Berlin où vit l’ancien tuba solo de l’Opéra de Marseille, à Aix, le jeune prodige Thomas Leleu déclinait son amour du « cross-over » au Grand Théâtre de Provence dans une création mondiale de Born to groove (CD paru le 21 mai 2021) en adjoignant à ses complices Laurent Elbaz (piano, claviers, arrangements), Yoann Schmidt (batterie), Kevin Reveyrand (basse), Jérôme Buigues (guitare) et François Chambert (saxophone, clarinette), l’Orchestre du Conservatoire Darius Milhaud placé sous la houlette de Michel Durand Mabire. Relier les instruments jazziques et ceux de l’orchestre « classique » permettait au musicien d’unir sur un même plateau ses goûts éclectiques, sa formation classique et son amour du jazz.

En préambule à la soirée, le tubiste livrait quelques explications sur l’histoire de l’instrument tuba et la multiplicité de ses formes, ce qui justifiait le désarroi général lors de l’attente interminable qui devait ramener son propre tuba à Aix, (le seul trouvé au conservatoire qui aurait pu le remplacer ne convenait pas vraiment !). Puis il donnait quelques pistes biographiques son parcours, le choc ressenti à la découverte de la mythique compagnie de disques Motown à neuf ans, son amour du jazz qu’il jouait en cachette entre les cours traditionnels du conservatoire, évoquait les encouragements de son frère : « suis ton instrument ! ». « En effet, sourit le jeune musicien, c’est lui qui me mène. Dans ce spectacle il y a des compositions que j’ai faites à quinze ans sur le piano de ma mère, j’en avais gardé les enregistrements. Ici, c’est un rêve d’enfant, d’ado, qui se réalise ». 

Thomas Leleu @ Thomas Ales

Thomas Leleu @ Thomas Ales

Révélation instrumentiste aux Victoires de la Musique 2012, le « Paganini du tuba » apporte sa fraîcheur sa curiosité, son empathie, son intelligence, sa vivacité : la scène semble se transformer en cour de récréation, en lieu de tous les possibles, univers de joie partagée, de souvenirs, d’émotions. La musique voyage, nous donne rendez-vous en Afrique, au Brésil, s’attarde sur le Corcovado et la plage de Sao Paulo. Celui qui « rêvait de vivre toutes les musiques » part à la rencontre des lieux de la planète, le transcrit dans sa propre pâte, rend lumineux son Melton Meinl Weston, dialogue avec les autres instrumentistes dont les solos éblouissants se lovent sur les nappes sonores de l’orchestre. 

Le tuba, cet instrument délaissé, « un quart d’heure sur les six d’un opéra de Wagner », devient le socle des mélodies et des rythmes, s’envole en improvisations élégantes et passionnées, épouse la danse de son instrumentiste. Un thème de Schubert vient flirter avec le swing, on s’envole pour « Leleuland » (nom donné par le pianiste et arrangeur, fidèle depuis les débuts du jeune soliste). Le monde s’ouvre à tous les courants les mêle sans les oblitérer. On est touché par la capacité intacte d’émerveillement de l’enfant devenu grand et qui a la planète comme aire de jeu. Un appel à la beauté des êtres et des choses plus que nécessaire alors que la folie de certains cherche à la nier.

Concert donné le  2 décembre au GTP, Aix-en-Provence

Bonheurs jazziques

Bonheurs jazziques

Une troisième édition de haut vol pour le Rendez-Vous de Charlie, ce « petit frère du Charlie Jazz Festival » imaginé par l’association Charlie Free, a enflammé le public de la salle Guy Obino de Vitrolles
Internationales, les deux journées de ce temps fort de l’automne convoquaient en quatre concerts un florilège d’exception. La première soirée était placée sous le signe de la trompette avec Hermon Mehari puis Erik Truffaz, la seconde se concentrait sur des hommages, que ce soit avec le tromboniste Daniel Zimmermann et sa réinterprétation de l’œuvre de Serge Gainsbourg ou Kenny Garrett et son dernier projet, Sounds from the Ancestors. 

Trompettes

La trompette d’Hermon Mehari ouvrait le bal, inspiré par l’Érythrée que son père a fuie en raison de la guerre. Ce pays, visité une seule fois par le jeune musicien, a nourri les huit titres de son album, Asmara (nom de sa capitale). Si les rythmes renvoient pour beaucoup à ceux des musiques traditionnelles du pays de la Corne d’Afrique, la trompette veloutée se livre à des improvisations qui nous ramènent à l’univers du jazz, en volutes somptueusement orchestrées auxquelles répondent les performances du piano de Peter Schlamb, ami de toujours (« depuis dix-sept ans, complice musical déjà à Kansas City ! », sourit le trompettiste). La fête s’invite avec Melsi et ses musiques de danse, la fluidité du jeu du pianiste qui mêle les techniques du jazz et du classique, rivalise avec celle du trompettiste, tandis que la contrebasse de Luca Fattorini s’évade en solos inoubliables que scande, imperturbable Gautier Garrigue à la batterie.

Instrumentiste au long cours, Erik Truffaz, cet incomparable explorateur, revisitait quelques thèmes du cinéma (concert que l’on retrouve dans son dix-septième album en deux volets, Rollin’ & Clap), débutant en solo avec une trompette en épure, par le motif de La Strada, vite rejoint sur scène par Alexis Anérilles (claviers), Valentin Liechti (batterie), Marcello Giuliani (basse) et Matthis Pascaud (guitare). Le trompettiste au chapeau (il est coiffé de son éternel feutre noir) accorde son souffle aérien à ses mémoires de pellicules, convie Fantômas, Les tontons flingueurs, Le Casse, Ascenseur pour l’échafaud, One Silver Dollar. La musique des films est déclinée avec un amour et une espièglerie d’enfant. On repasse par des sentiers connus, le compositeur reprend Yasmina (écrite en 2001). Complicités entre la puissance de la trompette, l’incandescence de la guitare, les inspirations brillantes de la batterie, les échappées pianistiques…

Erik Truffaz au festival Rendez-Vous de Charlie à Vitrolles, automne 2023

Erik Truffaz, Rendez-Vous de Charlie © DR

Et hommages

Le 4 novembre, L’Homme à tête de chou in Uruguay, idée originale du tromboniste Daniel Zimmermann, offrait une relecture éclectique et personnelle de pièces du compositeur et « génial tricheur » (ibid) que fut Gainsbourg. Le musicien allait dénicher des passages oubliés, extrait de Rock Around the bunker (1975), de Gainsbourg Percussions (1964, New York USA ou Machin choses), ou des passages « mythiques » comme La Ballade de Melody Nelson, accompagné de la batterie de Julien Charvet, la guitare de Pierre Durand et la basse de Jérôme Regard.

Enfin, le dernier compagnon de route de Miles Davis, le saxophoniste Kenny Garrett, accompagné de Rudy Bird (percussions), Keith Brown (piano), Ronald Bruner (batterie), Jeremiah Edwards (contrebasse) et Melvis Santa (percussions & chant), présentait son dernier album (paru en 2021), Sounds from the Ancestors. Le musicien s’affirme ici comme un maillon de la longue filiation aux ramifications multiples du jazz. Son premier titre, It’s time to come home, souligne cette appartenance avec un saxophone alto qui chaloupe sur des percussions (Rudy Bird) qui semblent nées au cœur d’une cérémonie de chants Yoruban. 

Kenny Garrett au festival Rendez-Vous de Charlie à Vitrolles, automne 2023

Kenny Garrett au festival Rendez-Vous de Charlie © DR

Les « ancêtres » seront tour à tour Stevie Wonder, Aretha Franklin, son mentor, le trompettiste Marcus Belgrave, les batteurs Art Blakey ou Tony Allen dont le beat afro inspira Fela Kuti, et bien sûr, Miles Davis dont il fut le compagnon de route durant des années. Jazz, R&B, gospel de la ville natale du saxophoniste, Detroit, se retrouvent avec une richesse pailletée dans ce concert où les strates historiques nourrissent puissamment une inspiration personnelle qui dispense un art de la joie communicatif.

Seule ombre au tableau, la programmation est masculine à quasi cent pour cent (la chanteuse du concert de Kenny Garrett, Melvis Santa, n’était pas prévue dans la programmation initiale et sa ligne mélodique calquée sur celle du clavier ou du saxophone n’entre pas dans la structure des pièces). Promis, Aurélien Pitavy, directeur artistique de Charlie Free, annonce de fantastiques pointures féminines à l’affiche de la programmation annuelle du Moulin à Jazz !

Salle Guy Obino, Vitrolles, les 3 & 4 novembre dans le cadre du Rendez-vous de Charlie.x

Lewis Caroll à l’heure du jazz !

Lewis Caroll à l’heure du jazz !

Ils nous en avaient donné un avant-goût lors du festival de Pâques à la fin de la représentation de Pierre et le loup au Jeu de Paume, les dix-sept musiciens de The Amazing Keystone Big Band revenaient au Grand Théâtre de Provence cette fois pour livrer à une salle comble leur version originale d’Alice au pays des Merveilles, composition qui permet d’arpenter les différents styles de jazz, chacun se trouvant associé à l’un des personnages du roman de Lewis Caroll adapté pour la scène par Sandra Nelson 

À la jubilation d’entendre une formation de big band, avec son armada de trompettes, trombones et saxophones sans compter batterie, piano, contrebasse et guitare, se greffait le plaisir des mots portés par une Alice (Yasmine Nadifi) qui ne supporte pas de s’ennuyer dans le jardin aux côtés d’une grande sœur qui lit un livre « sans images ni dialogues ». Heureusement, vient la distraire l’apparition d’un Lapin Blanc très pressé (Sébastien Denigues qui endossera tous les rôles ainsi que celui du récitant). Nul besoin de décor ni de déguisements complexes, une écharpe autour de la tête, une veste de costume et le Lapin est en piste, un nuage de fumée, et la chenille apparaît, un boa en plumes blanches et le sourire du Chat du Cheshire s’étire ; un effet de lumière, des bras qui battent le vide et la petite fille entame sa chute dans l’étrange terrier dans lequel elle s’est engagée… Bien sûr le récit n’est pas exhaustif, combien d’heures de spectacle pour toutes les péripéties di livre original Les Aventures d’Alice au pays des merveilles ! 

The Amazing Keystone Big Band au GTP, Aix-en-Provence

Keystone Big Band © Maxime de Bollivier

 Le propos n’est pas là, il s’agit de transcrire la magie, le goût de l’absurde qui prend sens, de se glisser dans les délices de l’imagination et surtout d’arpenter les territoires du jazz. La composition due à Bastien Ballaz, Jon Boutellier, Fred Nardin et Davis Enhco, mêle son inextinguible verve aux différentes étapes du récit, donnant à entendre un panorama de l’histoire du jazz, Duke Ellington accompagne le Lapin Blanc toujours en retard, James Brown et ses élans funky la chute d’Alice, un air de reggae pose son empreinte sur le jazz de la Chenille qui fume, le mambo suit les délires du Chapelier fou, la Reine de Cœur sera annoncée par une fanfare… Count Basie rejoindra Alice dans son retour à la réalité.

Le concert clairement dédié aux familles et aux enfants à partir de sept ans enthousiasme la salle. En cadeau pour les plus grands, l’ensemble offre un extrait de West Side Story, le Mambo, et le Troublant Boléro de Django Reinhardt avant de présenter avec humour les diverses familles d’instruments du big band tandis que les instrumentistes livrent des exemples de solos, échos des passages virtuoses offerts tout au long du spectacle. Un petit bijou coloré qui amorce la période des festivités de fin d’année.

Le spectacle Alice au pays des Merveilles a été joué les 20 et 21 octobre au Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence