Les quatre musiciens d’Oni Giri (devoir des démons ou boulette de riz entourée d’une algue en japonais ?) signent leur deuxième album (Vertige était paru en 2022), Le jardin des rêves. Et c’est bien un monde onirique/ « onigirique » (d’après leur vocabulaire) que dessinent les huit compositions du pianiste Rémi Denis. En un jeu fluide où les thèmes tournent ostinato une musique envoûtante déploie ses orbes, échos des courts textes poétiques du pianiste, haïkus libres inspirés du quotidien, impressions fugitives saisies par les mots et transcrites musicalement.
La Chanson pour cinq doigts qui ouvre l’album est inspirée d’une mélodie que le musicien a improvisée à une main au piano avec son fils sur les genoux. Le piano s’emporte en vagues joyeuses, ébauche une mélodie avec la trompette de Christophe Leloil, rejointe par le reste du groupe, Say Nagoya au saxophone, Damien Boutonnet à la contrebasse et David Carniel à la batterie. Espiègle, Swing the Swiffer évoque les facéties de sa chatte, Swing. Nilgiris, du nom des « Montagnes bleues » situées à la frontière du Kerala en Inde du Sud, laisse à la contrebasse une partition subtile qui répond au lyrisme du piano, sans doute en raison de la couleur bleu mauve des fleurs de ces hautes montagnes (le plus haut sommet atteint 2 634 m) qui fleurissent dit-on tous les douze ans…
Autres sommets avec Premières Neiges à l’enthousiasme fertile, le compositeur pose des notes sur ses longs voyages à pied ! En contrepoint, le piano délicatement fluide ouvre Le Cri du Chewbiemouth des Forêts que la faconde de la trompette et du saxophone conduit à l’exubérance. Autre mythologie, Tale of the Golden Donkey, tisse avec élégance les thèmes virtuoses des soufflants. Planant, 7, (oui, un chiffre parfois suffit, on l’interprètera comme on voudra) offre son atmosphère soyeuse au solo de bugle sur tapis de batterie et contrebasse. Enfin, Minuit dans le Jardin des rêves esquisse des paysages vaporeux où la nuit veloutée du jazz nous enveloppe. Superbe !
Le Jardin des rêves, Oni Giri, enregistré aux Studios La Buissonne, production avec le soutien de la Région SUD