En trois soirées et six concerts, la septième édition du Blues Roots Festival de Meyreuil a rempli ses promesses.
Deux concerts se succédaient tous les soirs, déclinant chacun un univers particulier. Chaque spectacle semble être le plus incroyable, le plus exceptionnel. On se laisse emporter par les voix, les instruments, leur inventivité, leur capacité à renouveler le genre du Blues, le croisant avec le rock, la soul, multipliant les géographies musicales, passant en Louisiane, en Virginie, au Texas, au Nigéria, en Alsace avec des phrasés berlinois… Le blues prend alors une dimension universelle où se disent la vie, les notations du quotidien comme les grands thèmes politiques au sens noble du terme. Une mémoire profonde se tisse à la modernité et le résultat est aussi varié que puissant. Le public n’est pas dupe, qui vient, chaque année, plus nombreux. L’édition 2025 a joué à guichets fermés, réunissant sur les trois soirées plus de 3000 spectateurs. 

 Soir I

 Le Pitchoun

En ouverture, place au jeune Mathias Lattin qui a préféré la musique au basket et n’a pas suivi les traces de son grand-père, David « Big Daddy », NBA Hall of Famer, et a remporté en 2023 l’International Blues Challenge à Memphis, le plus jeune à gagner cette récompense depuis sa création !

Le « pitchoun » (23 ans) de la programmation, ainsi le présenta André Caboulet, directeur artistique du festival, étonnait par la maturité et la richesse de son jeu qui fit dire au guitariste D.K. Harrell qu’il le considérait comme « le Frank Zappa du Blues ».
Le concert était construit autour de chansons de son premier album, UP NEXT qui se moque des frontières du blues et lorgne du côté des musiques afro-américaines et de son deuxième opus dans un esprit voisinant davantage avec la soul.
Les influences de Wes Montgomery, George Benson Albert King sont sensibles dans l’approche du jeune musicien aux solos ébouriffants.
La main gauche s’échappe du manche de la guitare semblant découvrir d’autres harmonies, ou s’en dégage comme si les cordes étaient devenues brûlantes… 

Mathias Lattin / Blues Roots Festival © François Colin - Ville de Meyreuil

Mathias Lattin / Blues Roots Festival © François Colin – Ville de Meyreuil

Riffs agiles, fantastiques pianissimi dans les aigus, la virtuosité de l’instrumentiste accompagné par Jesse Gomez à la basse et Nicholas Andres à la batterie, rejoint celle du chanteur qui avec naturel parle du quotidien et des tribulations amoureuses (comme dans le magnifique Who’s been loving on you).  Puis, à la suite d’envolées virtuoses, d’amples accalmies laissent un rythme de blues émerger du silence et c’est très beau.

 Girly

Avec sa guitare au corps rose et au manche doré, Sue Foley pourrait apparaître comme un résumé de la frivolité et de la mièvrerie. Il n’en est rien ! D’abord sa guitare est une Fender Telecaster rose cachemire lorsqu’elle ne joue pas en solo sur une guitare flamenco mexicaine fabriquée à la main, et cet instrument est doté d’une voix qui duettise avec celle de la chanteuse en superbes respirations lyriques. 

Multi-primée, elle a conçu un nouveau recueil, One Guitar Woman :A Tribute to the Female Pioneers of Guitar, nomminé aux Grammy Awards 2025. Elle y rend hommage aux femmes pionières de cet instrument, telles Maybelle Carter, Sister Rosetta Tharpe, Ida Presti ou Lydia Mendoza. Son prochain livre (non seulement Sue Foley est une musicienne hors pair mais elle est aussi une universitaire, titulaire d’un doctorat en musicologie de l’Université York), Guitar Women : Conversations with the Heroines of Guitar (Sutherland House, 2026) évoque ses entretiens avec des guitaristes avant-gardistes. 

Sue Foley/ Blues Roots Festival © François Colin - Ville de Meyreuil

Sue Foley/ Blues Roots Festival © François Colin – Ville de Meyreuil

« Nous avons toujours été là, explique-t-elle, maintenant, nous le revendiquons ». Époustouflante d’énergie, conjuguant douceur et flamboiements avec une sorte d’espièglerie fine, elle entraîne ses complices, Jon Penner (basse), Chris Hunter (batterie) et Reo Casey (guitare) dans de fantastiques effervescences où le bonheur de la musique est palpable.

                                                                                                                                Concert du 11 septembre 2025 au Domaine de Valbrillant dans le cadre du Blues Roots Festival Toutes les photos sont signées © François Colin – Ville de Meyreuil