Le vingt-troisième Festival International de guitare de Lambesc a rassemblé une fois de plus la fine fleur de la guitare classique mondiale, faisant « salle comble » au parc Bertoglio de Lambesc. Choisis par Charles et Annie Balduzzi, les fondateurs historiques de cette manifestation unique dans le sud de la France, Clarisse Sans, Martin Vieilly et Arnaud Sans, tous trois guitaristes ont relevé le gant et ont su préserver l’esprit à la fois bienveillant, cordial et exigeant artistiquement du festival. 

Départ pour le Brésil

La soirée d’ouverture était consacrée à un seul musicien dont la venue exceptionnelle (il ne donne guère de concerts en Europe (seulement sept concerts cette année entre la France et l’Allemagne) était à marquer d’une pierre blanche : Yamandu Costa, originaire du Brésil, qui a commencé la guitare avec son père Algacir Costa, leader du groupe musical Os Fronteiriços (Les Frontaliers), puis s’est perfectionné avec Lucio Yanel, virtuose argentin installé au Brésil. Féru des musiques régionales du Sud du Brésil, de l’Argentine, de l’Uruguay, il s’est aussi intéressé aux créations de Radamés Gnatalli, Baden Powell, Tom Jobim, Raphael Rabello entre autres. Sa connaissance fine d’un vaste répertoire populaire et savant (la distinction est ténue !) lui permet des improvisations ébouriffantes. 

S’emparant de la fantastique richesse des styles du continent sud-américain, il construit son propre univers où sa guitare à sept cordes devient un orchestre, acrobatique sans le montrer (impossibles barrés, articulations démentes, vitesse impossible, le tout enveloppé dans un velours sonore). La plupart des pièces interprétées ce soir-là étaient issues de son dernier CD, Youtube Sessions, une série de morceaux composés durant la pandémie. Réaccordant la fameuse septième corde afin de changer de tonalité selon le climat abordé, le guitariste appuie sa tête contre le corps de sa guitare, ne faisant plus qu’un avec elle, et dessine des rêves éveillés où se croisent le « swing » du porro (colombien) « muy caliente », la poésie chaloupée de la milonga, les rêveries du choro, les danses de la samba, le romantisme d’un boléro, l’hommage à une famille de trois musiciens de Colombie (Amigos Saboya), un écho de Michel Legrand… Les capacités de la guitare à sept cordes, avec son amplitude, ses gammes, autorisent toutes les acrobaties, les harmonisations les plus complexes, déployant des sonorités profondes et chaudes.

Yamandu Costa au Festival international de Guitares de Lambesc 2023
Yamandu Costa au Festival international de Guitares de Lambesc 2023

Yamandu Costa festival de Lambesc © Mara des Bois

Les anecdotes fleurissent entre deux gorgées de maté : « ça, je l’ai composé durant le confinement, mes filles s’ennuyait et sautaient sur le canapé à côté de moi (Serelepe) ! (…) Ici, je rêvais, enfant d’avoir un cheval (Sarara) » … Les enfants, vives, bondissent tandis que le cheval galope sur les cordes de la guitare… Parfois un chant se love au cœur des accords, les oiseaux naissent sous les doigts du musicien en un jeu lumineux.

Une clôture tournée vers le futur

La soirée de clôture, ainsi que les concerts depuis le 30 juin, débutait par la prestation d’une des écoles de guitare de la région (ce soir-là celles du Conservatoire d’Avignon), soulignant avec force la vitalité de la transmission, suivie par l’Ensemble de Guitares de Nice sur un medley de blues, jazz et musiques de film, thème cinématographique repris par l’Académie de Mandoline et Guitare de Marseille, dirigé pour la première fois par Raphaël, sourit le génial mandoliniste Vincent Beer Demander, à l’origine de cette magnifique formation qui interpréta en création mondiale le Concertino pour mandoline (avec V. Beer Demander en soliste) de Claudio Mandonico, une bouffée d’énergie et de vivacité.

Comme pour une tournée d’adieux, les concertistes des veillées précédentes venaient donner un aperçu de leur art, Rolf Lislevand et sa guitare baroque en un jeu précis, complexe, aux sublimes lignes mélodiques, Roberto Aussel et sa vision nostalgique de l’Argentine, le Duo Dolce Vita composé de Vincent Beer Demander et Alberto Vingiano au pays d’Ennio Morricone, le Quarte Tomás et une espagnolade endiablée. Enfin, le final réunissait sur « 39 chaises », les musiciens de la soirée sur deux pièces orchestrales dirigées par Vincent Beer Demander. Le clou étant la tarentelle inspirée, le Tiramisu du Panier de Vincent Beer Demander. Saveurs !

Soirée de clôture, Festival international de Guitares de Lambesc

Clôture du Festival de Lambesc 2023 © Mara des Bois

Soirées du 29 juin et du 2 juillet, Parc Bertoglio, Lambesc