La nouvelle exposition temporaire du 3bisf, Sympathies n° 1, permet de découvrir l’artiste en résidence, Juliette George

Il s’agit de la première exposition personnelle de la jeune artiste dont le parcours est aussi brillant qu’atypique. Après une classe préparatoire littérature et un master en géopolitique, elle intègre l’ENSP d’Arles (École nationale supérieure de la photographie) en 2018 où elle obtient son diplôme avec les félicitations en 2021 en rendant à l’examen final, non une photographie mais un texte. Le dispositif sous l’égide de la commissaire de l’exposition, Marion Zilo, s’organise en trois volets. 

Face à la salle principale semée de méridiennes d’époques et de formes diverses, deux cellules ouvertes : celle de droite, tapissée de mots qui constituent une cartographie intérieure, correspondrait à l’hémisphère droit du cerveau, celui de la réflexion, et celle de gauche, plus austère, contenant un simple monolithe blanc dont la partie supérieure comprend une simple étagère où attendent, serrés les uns contre les autres les exemplaires du premier livre de l’artiste, Sympathies n°1. Au visiteur de s’emparer d’un volume, de s’installer confortablement sur l’une des méridiennes et de se plonger tranquillement dans la lecture.

cellule 2 Juliette George au 3bisf

Les grands lés de papier qui recouvrent la surface des murs de la cellule n° 1 sont le développement graphique d’un travail qui tenait dans un mètre carré confie l’artiste : « ce sont mes notes préparatoires, dans la forme même où je les ai transcrites ». 

On y lit les injonctions qu’elle se donne à elle-même «  répondre à des Apl à projets », « trouver ma narration – mon adresse – mélange contemporain de théories psychiatriques et de fiction », des citations en vrac de Flaubert, Foucault, Lacan, Jauss, Genette, Barthes, Gustave Guillaume, linguiste dont le nom est enserré dans un angle inversé posé sur un ligne en référence à sa perception du temps, des questionnements, « qu’est-ce que c’est pour moi le plaisir du texte ? », des éléments historiques sur le traitement et la perception de la folie, des anecdotes, des définitions, celle de la fiction par exemple de « defigo (planter, ficher, enfoncer), defigere, fixer les yeux sur le sol, les regards sur quelque chose, paralyser, rendre immobile, établir, déclarer, percer l’image de quelqu’un avec une aiguille, envoûtement, vs l’histoire (histanumi : principe de fiction est une fixation)…

Juliette George remarque dans son livre qu’elle « n’a pas trouvé de théorie de la réception de l’œuvre relative au confort matériel » mais que des chercheuses de l’Association for Research in Vision and Ophtalmology (Maryland) « avaient conclu une enquête en estimant que les postures avaient leur incidence autant sur le plaisir que sur l’efficacité de la lecture ». 

Des méridiennes pour lire tranquillement

Bref, le dispositif mis en œuvre ici c’est aussi « donner au collectif les qualités de l’individuel ». Les visiteurs ne se privent pas de ce nouveau confort et se prennent à rêver de l’extension d’une telle initiative.
On retourne au livre, invariablement, les histoires se tissent, celle du 3bisf, de la psychiatrie, de la résidence, du père interné à Sainte-Anne le jour où Juliette George reçoit l’appel à candidature pour le 3bisf.